POLICE , VIDÉO
Police, vidéo 2005, durée 9 mn 20 Texte de Gabrielle Vitte
Agnès Accorsi développe depuis 1999 un inventaire filmique de diverses mises en scène de l’individualité au travers de ses autoportraits.
Elle parcourt des paysages avec une indifférence qui nous interroge sur notre perception du réel, sur la frontière entre nature et civilisation, avec, dans chacune de ses oeuvres, la récurrence d’une femme impassible, figée, au visage toujours absent.
Dans l’âme hospitalière, sur les rives de la Méditerranée gorgée de soleil, dans une jupe à fleurs à la Lily Van Stocker, elle enchante le spectateur, le séduit, puis le surprend par la menace d’un danger imminent: Méduse a un Uzi.
Critiques des images? de la perception ? ou dédoublement de la personnalité qui provient des peurs intériorisées? Dans police, elle se déplace sur la grève désertée, avec lenteur, et nous invite à suivre des empreintes au sol, à fouiller des débris de palissade en plastique…, autant d’indices pour une enquête qui très vite échoue en dépit du brassard rouge!« police!» qu’elle arbore.
Car c’est ailleurs qu’il faut porter notre regard.
Elle introduit dans l’inventaire de la beauté des sites, des lieux vides, des cabanes de planches qui collectionnent des traces de vie estivale et renvoient aux constructions précaires si présentes dans l’ile, abris de pêcheurs, d’outils et même de bétail. Les planches grossièrement clouées rappellent celles d’Ilya Kabakov. Même sous développement ?même précarité ?
L’enquête est aussi d’une autre nature.
Elle dérobe son visage et ne répond pas au regard du spectateur : au désir, elle répond par le lisse (peau lisse), par le besoin de l’inexprimé, par l’indifférence à la beauté violente des paysages, qu’elle affecte de ne pas voir pour résister à sa passion délétère pour son île, brider son désir de possession et sa construction intérieure d’ îlienne. Le corps de la femme se dissout brutalement dans la blancheur de l’écran…